Dossier VST n° 147: Les effets du langage technocratique

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Depuis plus d’une décennie les effets du fonctionnement néolibéral influencent les organisations du travail, les façons de penser et de vivre. Des glissements sémantiques se sont peu à peu opérés du monde de l’industrie jusqu’au cœur du langage ordinaire, affectant ainsi notre rapport au monde. 
Dans quelle mesure cette novlangue a-t-elle infiltré nos univers, y compris le travail social ?

Depuis plus d’une décennie, les effets du fonctionnement néolibéral, marqués par des logiques gestionnaires majeures, entament fortement les organisations de travail, nos façons de penser et de vivre. Souvent à l’insu des professionnels eux-mêmes, des glissements sémantiques se sont opérés du monde de l’industrie vers le langage « ordinaire », affectant ainsi notre rapport au monde. Dénaturant le sens de nos métiers et conduisant à réifier l’enjeu d’une rencontre. Dans quelle mesure cette novlangue a-t-elle infiltré nos univers, y compris le travail social ? Michel Foucault, dans son dernier enseignement, parlait d’un déplacement du pouvoir : de la pratique disciplinaire, ou du contrôle des corps, nous sommes passés à l’exercice du biopouvoir au profit d’une gestion des populations.
Ce dossier recueille des analyses, des témoignages et des expériences sur la façon de subvertir ce discours en pouvant parfois manier la langue de l’Autre, sans en être dupe. Comment continuer à exister, à agir ? Est-il possible de résister ?

La novlangue managériale s’’immisce, s’insinue, dépouille, appauvrit, vide, siphonne et finit par assécher la pensée, propage un virus aux effets toxiques insidieux, qui en se répandant s’empare du langage et atteint les actes.

Renverser la dictature des dogmes

À travers des articles qui abordent les notions de "lean management", "néo-management", de l’hypothèse freudienne, de normalisation déshumanisante du monde et des individus, le dossier alerte sur le risque d’aller vers une pensée figée, encourage à renverser la dictature des dogmes et à annihiler le détournement de l’éthique. Avec l’humour comme instrument de résilience, les inventions au quotidien provoquent de la respiration. L'enjeu politique s'oppose à l'idéologique loi du marché, à la gouvernance par les chiffres, à la surabondance des protocoles et des procédures. Les échappatoires et les stratégies d’évitement sont difficiles à mettre en place, elles se heurtent au cours d'un processus inéluctable qui nous happe.

Des espaces de délibération pour libérer

Ce dossier propose des analyses, témoignages, expériences sur la façon de subvertir ce discours dominant (manier la langue de l’autre sans être dupe ) qui permettent de traiter ce sujet éminemment brûlant et éclairent sur les manières de continuer à exister à agir, à résister. Comment se traduisent les effets de la langue technocratique dans les univers du travail social et du soin ? Quels sont les espaces de délibération, de mise au travail collectif ? Quelles sont les conditions pour se dégager d’éventuelles logiques d’emprise ? Telles sont les questions posées par les contributeur·trices de ce dossier. Et même si toutes les réponses ne s’y trouvent pas, des pistes sont données qui peuvent alimenter la réflexion et être transposées sur le terrain et dans la réalité professionnel·le de chacun·e.

« désobéir, une déclaration d’humanité ! »

 

Pêle-mêle et sans exhaustivité quelques étapes de cette réflexion que présente ce dossier : des mots et des hommes ; la clinique de la parole au temps du libéralisme ; lorsque glissent les mots de la tribu ; le coût psychique de la labellisation ; pour une clinique de la souffrance au travail ; un, deux, trois nous n’irons plus au bois ; je suis putschiste ; se jouer des mots.