Dossier VST n° 152 Le travail de rue
Parmi les diverses façons de mettre en acte l’accompagnement social, psychologique, médical des personnes, le travail de rue occupe une place particulière. Il s’agit d’aller vers les personnes qui sont sans liens avec les institutions, d’aller les voir où elles sont : dans la rue. C’est un travail sans le filet de protection des murs institutionnels.
Parmi les diverses façons de mettre en acte l’accompagnement social, psychologique, médical des personnes, le travail de rue occupe une place particulière. Il est marqué par les premières pratiques de la prévention spécialisée dans les années 1950, plus récemment par les « maraudes » sociales, psychosociales, psychiatriques, humanitaires. Il s’agissait – il s’agit toujours – d’aller vers des personnes qui sont sans liens avec les institutions, d’aller les voir où elles sont : dans la rue. C’est un travail sans le filet de protection des murs institutionnels, des rendez-vous, des demandes d’aide formulées bien dans la norme, que d’aller proposer ses services à ceux et celles qui ne demandent (plus) rien. Comment ce travail de première ligne s’articule-t-il avec les pratiques et les institutions « classiques » ? Quelles compétences sont nécessaires pour l’exercer ? Y a-t-il une professionnalité particulière ? Comment se passent la rencontre, l’offre d’attention, l’écoute ? Mais aussi : peut-il y avoir sortie de la rue, dans le sens d’un retour ou d’un accès au modèle d’insertion sociale du plus grand nombre ?
Ce dossier s’appuie sur trois réseaux : le réseau national « jeunes en errance », Samusocial international et le réseau international des travailleurs sociaux de rue. Présentations de pratiques, prises de recul sur celles-ci et perspectives plus globales en constituent le menu.
Une nécessaire complémentarité
Pendant de nombreuses années le travail de rue a été l’apanage de ces équipes de prévention spécialisée. Les maraudes caritatives et humanitaires-et l’action bénévole- sont indispensables, comme l’est le travail de rue quotidien et permanent. Plus qu’une opposition, la complémentarité opère.
Travailler dans la rue, dans quel but ?
Ce dossier propose en 1e partie d'aller à la rencontre des jeunes en errance avec le Samusocial de Lyon, des usagers de drogues dans un quartier difficile de la métropole lilloise avec des professionnels de la réduction des risques liés à la consommation. Il propose également d'aller la rencontre des gens de la rue à Toulouse, à vélo, pour être au coeur de l’action, du lien et de la relation. Puis, décalons le regard à l'étranger : à Bamako, présentation du travail avec des adolescentes et des jeunes femmes par le Samusocial Mali; à Bruxelles, rencontre avec des professionnels qui proposent des soins infirmiers en rue. On retrouve aussi dans ce numéro des actions au Bénin et en Grande-Bretagne. Ces 4 équipes étrangères mettent en lumière des réflexions plus globales et plus politiques. L’équipe de prévention spécialisée du centre ville de Rennes ferme cette première partie avec la présentation d'une expérience issue d’un travail conduit pendant le premier confinement.
Tout sauf un outil de contrôle social !
La 2e partie de ce dossier propose trois textes centrés sur l’analyse de pratiques : les équipes de prévention spécialisée des Bouches-du-Rhône réfléchissent sur la façon d’être dans ce théâtre ouvert qu’est la rue, tandis que l’équipe mobile sociale et de santé de Toulouse propose une lecture déconstruite-reconstruite des rencontres et soutiens, au filtre de la psychodynamique. Camille Lacombe raconte son parcours au pays de la grande exclusion.
Enfin, dans la 3e partie, Roger Ouensavi, travailleur social au Bénin, articule le travail avec les enfants des rues et des éléments d’anthropologie. Ensuite, Olivier Douville propose des démarches et contenus de formation adaptés aux réalités de terrain et aux intervenant·es. Enfin, Graeme Tiffany nous engage à prêter attention à ne pas laisser glisser le travail de rue vers un outil de contrôle social.
"Aller se présenter aux gens en leur disant simplement : bonjour, qu’y-a-t-il à votre service ?"