Deux faits récents concernant directement des enjeux éducatifs et sociétaux ont marqué la fin de l’année dernière et le passage à 2011. Ils ont ceci de commun d’en appeler tous deux au respect et à la protection des droits des citoyens.
Le premier très médiatique concerne la vulnérabilité des jeunes enfants et la captation de leur attention par la télé. Il a relativement peu été repris par les médias, compte tenu sans doute de sa signification. Il s’agit pourtant de la décision de Canal Plus d’arrêter la diffusion de la chaîne Babyfirst, suite à une forte opposition, contre les chaînes de télévisions pour les bébés, de la société civile organisée, en particulier du Cieme, qui joua un rôle de stimulateur des pouvoirs publics et de co régulateur citoyen . Cette mobilisation, n’est pas si éloignée de l’approche qu’ont eue les institutions dont le projet central est l’enfance (Comité des droits de l’enfant de l’ONU, ONG éducatives), en instituant des espaces séparant le monde de l’enfance (les mineurs), de celui des adultes (protection/travail des enfants ; protections/violences subies…). »
L’autre événement, chaque jour plus médiatisé, et présenté comme salutaire, est la parution d’un petit livre de Stéphane Hessel : Indignez vous ! S’il ne parle pas de protection et d’éducation, comme notre projet d’éducation aux médias, il articule résistance et démocratie, c’est à dire l’ensemble des principes et valeurs élaborés par le Conseil national de la résistance il y a soixante six ans, avec le devenir de notre société. Ce message a retenu notre attention, non seulement parce que son auteur est un grand résistant, réchappé des camps de concentration, et co-rédacteur entre autres de la déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, mais parce qu’il nous touche, parce que nous nous reconnaissons dans sa filiation.
Il y a dix ans, parlant de l’avenir de l’éducation nouvelle qui se jouera sur la question de l’altérité, nous écrivions « qu’il devient de plus en plus difficile de pouvoir garder intact et cultiver en soi et chez l’autre la lucidité d’être, il devient pour chacun de plus en plus difficile d’apprendre à préserver sa liberté d’être critique, à développer son individualité, son autonomie, à soutenir un état de rébellion et de révolte, cette capacité d’indignation mais aussi d’étonnement et d’émerveillement permanent, ce réflexe de solidarité qui sont les ressorts pour aller vers l’éducation nouvelle. »
Merci Cher Monsieur Hessel de nous rappeler encore et toujours que l’heure n’est pas à la résignation et au renoncement mais à l’insurrection des consciences. L’éducation aux médias par sa dimension citoyenne et critique s’inscrit dans cette véritable insurrection, qu’appelle de ses vœux Stéphane Hessel dans les dernières lignes de son ouvrage, « insurrection pacifique contre les moyens de communication de masse qui ne proposent comme horizon pour notre jeunesse que la consommation de masse, le mépris des plus faibles et de la culture, l’amnésie généralisée et la compétition à outrance de tous contre tous ».
Bertrand Chavaroche, rédacteur en chef de la revue VEN
Christian Gautellier, Directeur des Publications.