L’aménagement des rythmes scolaires ne concerne pas
uniquement l’organisation des horaires à l’école. Poser la question
du rythme de vie des élèves amène à s’interroger de façon beaucoup plus globale sur l’Éducation
et la place de l’enfant et de l’adulte dans les apprentissages.
S’il n’y a pas
de lien entre
les règles
de vie
instaurées
à l’école
et hors de
l’école,
comment
l’enfant
peut-il
construire
des repères
et établir
une
cohérence
entre
la règle et
son rôle ?
Si l’on n’a pas
le droit de
courir sous
le préau
pendant
la récréation et
qu’on le peut
durant le temps
périscolaire
(ou inversement),
quel
sens les enfants
peuvent-ils
mettre à
cet interdit ?
Cette rentrée scolaire repose la question du rythme de
vie des enfants. Depuis le mois de septembre, certaines
municipalités ont commencé à mettre en oeuvre l’aménagement
des rythmes scolaires et les Projets éducatifs territoriaux.
Au-delà des polémiques sur sa genèse et les conditions
de son application, ce dispositif a le mérite de pointer
la nécessité d’une prise en compte plus globale de la vie de
l’enfant. Les temps éducatifs sont multiples et les adultes
qui y participent aussi : parents, enseignants, intervenants
spécialisés en temps scolaire, animateurs du périscolaire,
personnel de cantine… auxquels, il faut ajouter tous les
adultes qui interviennent durant les temps de vacances de
l’enfant. Très souvent, ces différents espaces sont hermétiques
et sans lien entre eux.
UN ANACHRONISME DE FAIT
Cette absence de vision globale dans la prise en compte du
temps de l’enfant et de son éducation me semble anachronique
et inadaptée à la réalité. Les apprentissages sont
devenus encore plus globaux et interdépendants. Un enfant
qui fait une recherche sur internet chez lui, avec l’aide de
ses parents, de sa fratrie ou d’un copain, qui participe avec
un animateur à un atelier informatique en périscolaire ou
à la médiathèque, qui construit le blog du centre de loisirs,
est-il moins en apprentissage que s’il travaille l’informatique
à l’école ? Les situations ne s’opposent
pas, elles se complètent avec un environnement,
des spécificités et des enjeux différents. Certaines
missions de l’école se sont transformées. Il s’agit
moins d’apporter des connaissances, que de permettre
à l’enfant de pouvoir chercher, trier, gérer,
utiliser et mettre en synergie les informations auxquelles
il peut avoir accès. Mon propos n’est pas de
mettre sur le même plan un ensemble de situations,
très différentes de par leurs enjeux, mais de mettre
en évidence leur interdépendance et la nécessité de
mise en relation pour construire et faire sens.
Globalité du temps de l’enfant.
De même, en termes d’apprentissages sociaux, s’il
n’y a pas de lien entre les règles de vie qui sont instaurées
à l’école et hors de l’école, comment l’enfant
peut-il construire des repères et établir une
cohérence entre la règle et son rôle ? Si l’on n’a pas
le droit de courir sous le préau pendant la récréation
et qu’on le peut durant le temps périscolaire
(ou inversement), quel sens les enfants peuvent-ils
mettre à cet interdit ? Il peut y avoir des raisons
objectives, liées au nombre ou à d’autres facteurs.
Mais si elles ne sont pas explicitées, l’interdit
devient alors purement subjectif et l’école ou le
périscolaire mettent en place des règles de vie qui
se coupent de la réalité et ne font plus sens.
L’aménagement des rythmes amène à prendre en
compte les enfants de manière plus globale, en ne
considérant pas uniquement le temps scolaire, mais
en y incluant également le périscolaire. Cela ouvre
une porte sur la refondation de l’école et son adaptation
aux réalités de la société d’aujourd’hui et de
demain. Les associations d’Éducation populaire ont
un rôle important à jouer dans cette dynamique
pédagogique et cette réflexion pour un environnement
éducatif plus global.
INSTITUER DES TEMPS DE RENCONTRE
Le terme d’association complémentaire de l’enseignement
public prend tout son sens.
Se compléter pour permettre une approche multiple
des situations éducatives et d’apprentissages
dans lesquelles les enfants se construisent.
Mais cet aménagement des rythmes scolaires, s’il
ouvre la porte à une prise en compte plus globale
de l’enfant, amène aussi à s’interroger sur le statut
et le rôle des adultes qui les encadrent. Quelle formation
pour les animateurs et les intervenants du
périscolaire ? Sommes-nous dans une logique d’animation
volontaire indemnisée, d’animateurs professionnels
ou d’« intermittents » de l’animation ?
Se pose également la question du lien entre les différents
partenaires de cette cogestion du temps de
l’enfant. Elle nécessite d’organiser et d’institutionnaliser
des moments et des cadres de rencontre.
Toutes ces interrogations dépassent largement
la gestion d’une simple modification horaire et
induisent une réflexion de fond sur l’École et l’Éducation.
Mieux adapter l’environnement éducatif
et le rythme de vie aux besoins de l’enfant sont des
objectifs ambitieux, qui amènent à repenser de
manière profonde les pratiques pédagogiques.
L’Éducation nouvelle est toujours d’actualité.