Nous vivons actuellement dans un environnement
sociétal où l’évaluation est omniprésente et a
une forte tendance à se confondre avec la sélection.
Le conseil est souvent éliminatoire et l’on nous
montre quantité d’exemples où l’on ne cherche le
meilleur qu’à l’instant T. En multipliant les concours
tous azimuts, à destination des cuisiniers, des pâtissiers,
des chanteurs… les émissions de télévision
participent à cette tendance et en sont en même
temps le reflet.
L’école contribue elle aussi à une logique d’évaluation
où le normatif a parfois tendance à se
confondre avec le formatif. Lorsque l’on signale aux
parents d’un enfant de trois ans qu’« utiliser
le dénombrement pour comparer deux quantités »
est en cours d’acquisition, quel message est-il
envoyé ? Leur dit-on qu’il est en train de l’apprendre,
ou plus insidieusement qu’il ne le sait pas
encore…
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L’ÉVALUATION EST D’ABORD
UNE AUTO-ÉVALUATION
L’évaluation est une nécessité. Nous avons tous besoin
pour avancer de faire régulièrement le point sur ce que
nous savons, sur ce qui fonctionne et ce que nous
devons améliorer ou développer, que ce soit sur des
petites choses de la vie courante ou sur des compétences
plus complexes. Si le gâteau que je viens de cuisiner
est trop sec, cette évaluation me permettra d’en
chercher les causes et de les faire évoluer. Mais le fait de
réfléchir au temps de cuisson qui a peut-être été trop
long, ou de relire la recette pour voir si je n’ai pas fait
d’erreur, ne vient en aucun cas interférer avec le fait que
je sois capable de préparer un gâteau et ne m’élimine
pas. On retrouve régulièrement cette confusion entre
évaluation, conseil de formation et validation dans les
observations rédigées par les directeurs et les directrices
des accueils collectifs de mineurs, aux stagiaires Bafa.
Cela donne parfois des situations déroutantes lors des Jury départementaux. Le décalage entre des
observations pouvant apparaître comme étant
très négatives, pour un stage néanmoins validé
favorablement, amène régulièrement le jury à
demander des informations complémentaires
aux rédacteurs. Il en ressort la plupart du
temps une confusion entre conseils de formation
et validation, mais également une non globalisation
des situations, dans laquelle un
événement non représentatif d’un ensemble
est mis en avant.
La confusion entre évaluation formative et normative
est une vraie dérive et elle n’est pas
réservée à un secteur professionnel ou éducatif.
Être stagiaire pendant plusieurs semaines
ne signifie pas passer un examen continuel ou
chaque geste et chaque attitude sont sanctionnés.
Mais être accompagné dans sa formation
pour avoir une évaluation globale de chaque
compétence devant être validée.
Tu te rends compte, il ne sait pas faire cela !
C’est normal, il est là pour l’apprendre…
Il ne viendrait à l’idée de personne de reprocher
à quelqu’un qui commence à apprendre à
nager de ne pas savoir nager. Pourtant combien
de fois avons-nous entendu à propos de
stagiaires qu’ils ne savaient pas… alors qu’ils
en étaient à leur première expérience pratique.
Être en stage, c’est être en formation, donc
avoir la possibilité de faire des erreurs et d’être
accompagné pour améliorer ses compétences.
Cela amène à réfléchir sur le statut du tuteur ou de
la tutrice lors du stage, sur son rôle formateur et sur
tous les aspects que cela représente. Sa fonction est
de mettre la personne formée en situation de réussir et
de développer ses compétences et ses acquis, de l’accompagner
dans ses difficultés et de l’amener à
les dépasser. Le positionnement du formateur ou de la
formatrice n’est pas neutre. Porter un regard positif,
aider à analyser les situations vécues, apporter les
conseils ou les outils qui vont permettre de progresser,
induisent des comportements de la part des stagiaires.
Attendre et chercher l’erreur, en induisent d’autres très
différents. Mais accompagner avec bienveillance,
ne signifie en aucun cas accepter n’importe quoi, ne pas
sanctionner s’il y a une attitude ou des actions inadmissibles,
ou valider systématiquement même si la personne
ne remplit pas les conditions. On peut accompagner
et faire progresser quelqu’un, même si au final,
en fonction des critères, son stage ne sera pas validé.
Cette globalité de sens entre formation évaluation et
validation, a souvent du mal à être définie et admise,
ce qui génère des situations et des rôles ambigus.
Une ambiguïté qui peut être liée à une confusion
des tâches ou savamment entretenue, car mettant
le formateur en situation narcissique et de pouvoir
renforcé par rapport au formé. La principale dérive
étant le glissement de sa fonction formatrice, vers un
simple rôle de contrôle. Une autre dérive étant de se
positionner en modèle : « Regarde comme je fais
bien… » au lieu d’accompagner l’autre dans son cheminement,
de l’amener à se mettre en situation de suivre
et d’imiter au lieu d’analyser, d’imaginer et de
construire. Être responsable d’une personne en stage et
l’accompagner est une tâche complexe et globale. Mais
si Évaluation et Formation sont dans un bateau, prenons
garde à ce que Formation ne tombe pas à l’eau.
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Le « Spécial directeurs » 2017, Vient de paraître.
Le « Spécial directeurs » prend
en compte chaque année la
réglementation en vigueur et la
rend accessible à tous. Les textes
français et européens sont actualisés,
décryptés, analysés et commentés.
En 200 questions réponses
le « Spécial directeurs
2017 » vous accompagne dans
vos activités. Il apporte à la fois
des réponses concrètes et des
outils juridiques nécessaires au
bon fonctionnement d’un ACM,
ainsi que des éléments de
réflexion dans le cadre de
vos activités. Il intègre en pages
centrales un dossier sur les mixités
et le vivre-ensemble. http://publications.jpa.asso.fr