Formation Professionnelle aux Ceméa: l'exemple de l'INFOP

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L’INFOP ( INstitut de FOrmation Professionnelle) est le produit d’une histoire qui a commencé en 1971 à Bénouville (près de Caen), avec l’INFPRASE (Institut National pour la Formation Professionnelle des Responsables d’Animation Socio-Éducative). Cet institut a été créé à l’initiative de Pierre Girard, Francine Best, Jean Marie Michel et de quelques autres militant-e-s du mouvement.

De l’INFPRASE à l’INFOP : une contribution originale et importante pour le développement de la Formation Professionnelle aux CEMEA.

L’INFPRASE nait avec la loi de 1971, première loi relative au droit à la formation professionnelle continue. Cette loi s’inscrit dans le prolongement des « événements de mai 1968 », dont l’analyse socio-politique révèle une société bloquée freinant toute promotion sociale, en particulier pour les publics sortis de l’école avec des bas niveaux de qualification.

L’INFPRASE nait à la demande de nombreux Comités d’Entreprise avec lesquels les Ceméa avaient tissé des liens de partenariat dans un engagement en faveur de l’organisation de vacances d’enfants et de jeunes à travers la formation des moniteurs et directeurs de colonies de vacances. Beaucoup de stagiaires viendront en formation à l’INFPRASE par le canal de la militance syndicale et politique des Comités d’Entreprise et des municipalités progressistes. Le champ des vacances ne sera pas le seul à fournir de nombreux stagiaires puisque d’autres secteurs du champ socio-éducatif et socio-culturel saisiront ces opportunités de formation (associations diverses, centres sociaux, services municipaux de l’enfance et de la jeunesse, clubs et équipes de prévention spécialisée, lieux de vie, dispensaire d’hygiène mentale…).

Il s’agissait d’élargir le champ des compétences des acteurs et actrices de l’animation au-delà des formations à l’animation volontaire. La création du CAPASE (Certificat d'Aptitude à la Promotion des Activités Socio-Educatives) par le ministère de la jeunesse et des sports en 1971, dans une logique de promotion sociale, permettra à l’Institut de délivrer un « diplôme reconnu ». Ce certificat validait alors un « trajet » de formation, en évaluant la progression du ou de la  stagiaire entre son entrée et sa sortie du dispositif de formation.

L'éducation nouvelle comme référence pédagogique

A la création de l’INFPRASE, l'ingénierie pédagogique s'appuie très fortement sur l'expérience des formations d’animateurs au sein des stages des Ceméa, dont l'équipe est porteuse (internat et repas partagés, travaux collectifs en petits et grands groupes, recherche individuelle…). L'activité occupe une place importante dans ce cursus et se traduit par l'encadrement des stages de L'INFPRASE par les responsables pédagogiques des groupes nationaux d'activités (activités dramatiques, jeux plein air, activités manuelles et plastiques, environnement…).

En 1979, le DEFA (Diplôme d’Etat relatif aux Fonctions d’Animation) est créé. L’INFPRASE obtient l’agrément pour ce nouveau diplôme de l’animation professionnelle et devient le Centre National DEFA des Ceméa, conventionné par le FONJEP.

Installation dans les quartiers

En 1987, l’INFPRASE quitte Bénouville pour s’installer dans la banlieue nord de Paris, à Gennevilliers, au cœur des problématiques urbaines et où la demande de formation pour l’animation de la jeunesse des quartiers populaires et des différentes structures sociales et socio-culturelles est forte. Le modèle d’une formation militante basée sur l’internat, le travail en soirée et en week-end fait place au modèle d’une formation professionnelle avec la pratique de l’externat et des horaires référés au contrat de travail.

Années 90: L'INFPRASE devient l'INFOP

Au début des années 90, les CEMEA d'IIe de France se restructurent en se re-centralisant, devenant l'ARIF (Association Régionale d'Ile de France). L’INFPRASE devient alors l’INFOP, en élargissant son champ d'intervention (avec intégration des formations régionales à la petite enfance et à la santé mentale). La nouvelle structure absorbe l'Institut National de Formation Professionnelle, basé à l'Association Nationale et pilote une formation de formateurs d’adultes construite en partenariat avec l'UFR « sciences psychologiques et de l'éducation » que dirige André Sirota, militant des Cemea.

Tout en gardant sa structure initiale, l’INFOP devient un institut régional, s’intégrant à l’organisation territoriale mise en place en Ile de France (ARIF).

Un centre de référence pour l'animation professionnelle

Après l'échec de l'intégration des formations « petite enfance » et « santé mentale », l’INFOP se recentre sur l'ingénierie et sur les formations « Animation Professionnelle » pour l’ensemble de l’Ile de France. L’Institut a vocation à mettre en œuvre tous les niveaux de formation de la filière Jeunesse et Sport. Dans ce contexte, l’INFOP avait été choisi par le ministère JS pour préfigurer le 1er BEATEP et par la suite, a ouvert le 1er BAPAAT en France.

Dès son arrivée en Ile de France, le développement de L'INFPRASE/lNFOP, est confronté, aux énormes besoins de ce territoire (12 millions d'habitants) et devient exponentiel. L'équipe permanente passe de 6 permanents (4 pédagogiques et 2 administratifs) à 28, en l'espace de 6 ans ! La structure vit alors une crise de développement liée en grande partie à l'investissement dans l'insertion et dans le développement local, mettant en péril économique l'avenir immédiat de l'institut. Jean Luc Pieuchot et Guy Millérioux qui viennent de prendre la direction (1992) décident de recentrer l'activité sur le cœur du métier : la formation diplômante et la formation continue des animateurs et animatrices professionnels.

La mise en œuvre de ces formations s’appuie sur le développement d’un réseau de militants non permanents qui agissent sur le terrain, accueillent des stagiaires dans leurs structures et/ou interviennent dans des formations de l'INFOP ou les co-encadrent. Elle puise, pour cela, dans le vivier des stagiaires des formations longues diplômantes.

Une dynamique de travail collectif et régulier (préparations et bilan des stages, réunions d'équipe, analyse de la pratique...) a permis, dans la continuité des créateurs, le développement d'une ingénierie de formation référée à l'éducation nouvelle et à la pédagogie institutionnelle appliquée à la formation des adultes.

L'infop, véritable lieu de ressources pour le réseau Ceméa

Cette ingénierie pédagogique et de formation a apporté une véritable plus-value non seulement à l’institut régional lui-même mais a irrigué également l’ensemble du réseau des CEMEA. En effet, les formateurs permanents de l'INFOP sont impliqués dans les différents rendez-vous du mouvement : regroupements nationaux animation professionnelle, Universités d’Éducation Nouvelle, Congrès, où ils participent souvent à l'encadrement des temps de travail et font connaître leur pratique.

Par la suite, la mise en place d'un pôle « animation professionnelle » avec un-e responsable national-e favorisera la mise en place de plans de formation pour l'ensemble des formateurs et responsables de formation des Associations Territoriales. Les formateurs de l'INFOP seront très impliqués dans ce dispositif et de nombreux regroupements se dérouleront dans les locaux de l'INFOP à Gennevilliers. Ceci permettra aux stagiaires d'accéder à l'ensemble des démarches et outils pédagogiques et à l'INFOP de jouer le rôle de pôle ressource pour les formateurs des associations territoriales.

En 1988, des formateurs de l'INFOP ont rédigé un numéro « hors-série » de la revue Vers l'Education Nouvelle, « la bouteille à moitié pleine », sous-titrée « une formation au service du développement social » dans lequel sont développés les principaux éléments du projet de l'institut.

Tout au long de sa mise en œuvre, l’expérience pédagogique et institutionnelle de l’INFOP s’est structurée autour de 6 axes forts, ancrés sur la pédagogie institutionnelle et des pratiques d’Éducation Nouvelle, au service de la formation professionnelle : l’alternance, la prise en compte de la logique de scolarité, le développement de l’apprentissage, la promotion personnelle et professionnelle et le développement des partenariats avec l’université, l’accompagnement culturel dans les formations, une ingénierie de formation mise au service de l’International.

« L’aventure » de l’INFOP s’achèvera en 2013… Le départ progressif des membres historiques de l’équipe, la réorganisation des activités régionales pour des raisons économiques et l’abandon des locaux de Gennevilliers ont acté la fin de l’existence de l’Institut.