Longtemps objet de polémiques,
la mixité s’est généralisée
dans les années 1960-
1970, bénéficiant alors d’un
large consensus. Et puis, ces
dernières années, la tendance
s’est inversée de façon assez
spectaculaire. L’idée en a été
critiquée par nombre de sociologues,
de pédagogues et de moralistes
notamment religieux.
Loin d’être une réussite, elle
aboutirait au contraire à nuire
à l’apprentissage des relations
entre hommes et femmes.
Jean-Pierre François affiche
d’emblée sa profonde conviction :
la société est socialement,
culturellement et sexuellement
mixte, l’éducation ne peut pas
ne pas l’être. Cette mixité n’est
pas une notion abstraite, une
hypothèse naïve ou un rêve illusoire,
c’est un impératif au
développement politique, économique
et humain du vivre
ensemble. Et si des difficultés
existent bel et bien, ce n’est pas
tant dans le principe que dans
son application qui ne va pas de
soi. La rencontre avec l’autre,
qu’il soit de genre, d’ethnie ou
de culture distincte présente,
par essence, un risque de rigidité,
d’enfermement et de repli
sur soi. La crainte de l’affrontement
aux différences provoque
potentiellement résistance
et réticences. Et c’est là
le rôle de l’éducation que d’aider
à gérer ces tensions naturelles
entre ce qui distingue et
ce qui est commun entre filles
et garçons qui sont à la fois
identiques et uniques, dissemblables
et similaires.
L’auteur se refuse de s’inscrire
dans l’opposition binaire entre d’un côté la vision essentialiste
qui naturalise les spécificités
sexuelles et de l’autre la
conception culturaliste qui les
réduit à un simple formatage.
Certes, les progrès de la neurobiologie
ont permis d’invalider
la conviction, longtemps dominante,
voulant que la compétitivité
et l’agressivité masculine
aient pour origine la testostérone,
tandis que l’émotivité et
la sociabilité féminines seraient
produites par les œstrogènes.
De fait, il est bien compliqué
de démêler la part des gènes de
celle de l’environnement, le rôle joué par les hormones et celui
de l’entourage. Trop souvent,
filles et garçons vivent côte à
côte et se perçoivent au travers
d’idées reçues. Ce sont justement
les séquences vécues en
commun qui peuvent leur permettre
d’éprouver la richesse
de leurs différences qu’il ne
s’agit ni de nier, ni de camoufler.
Ce sont les a priori simplistes,
les stigmatisations hâtives et
les catégorisations aliénantes
qu’il faut combattre. L’auteur le
proclame : nous sommes comptables
des dérives constatées, si
nous ne luttons pas contre elles.
C’est aux adultes en général et
aux éducateurs en particulier
d’engager ce travail modeste
et résolu, quotidien et sans relâche,
permettant aux unes et
aux autres d’apprendre à se
reconnaître mutuellement, se
considérer réciproquement et
se respecter individuellement.
Jacques Trémintin